Regard posé sur les lettres humaines, l’humanisme est une réflexion sur la somme des connaissances culturelles et philosophiques acquises par l’humanité : une vision critique des oeuvres littéraires classiques ayant pour centre d’intérêt l’homme, ses idées, ses créations et son histoire.
La récente série de Paul Béliveau, intitulée Les humanités, constitue autant un hommage aux grandes idées, aux oeuvres maîtresses, aux personnages illustres – qui encore aujourd’hui, influent sur notre façon de voir et de penser notre monde – qu’un regard introspectif sur une production artistique riche et accomplie.
En effet, Béliveau nous montre, dans la plupart des tableaux, des dos de livres qui ont participé à sa culture artistique, ou encore, qui contribuent à la création de ses oeuvres. Chaque tableau présente un livre, un tableau de grand maître illustré dans un livre, une architecture classique, une illustration du milieu naturel ou, comme c’est le cas dans la majorité des oeuvres, une combinaison de ces éléments. Le vocabulaire pictural employé par l’artiste pour cette série fait appel à une vaste culture générale. Dans Les humanités, Béliveau joue avec ce langage pour accomplir un travail introspectif : il va aux sources mêmes de son imaginaire et de ses interrogations, n’hésitant pas à citer directement les grands maîtres qu’il admire ou qui ont joué un rôle déterminant dans sa formation d’artiste ou, encore, les livres qui composent sa bibliothèque.
Les “accumulations” de livres – ou de dos de livres plus précisément – font penser à des couches sédimentaires de connaissances, de savoir, d’influence et d’intérêts, déposées les unes sur les autres comme pour marquer le passage du temps. Par exemple, dans la partie du bas, on peut reconnaître les couches les plus anciennes, les plus solides, les moins mouvantes : les premièeres lectures, les moments lointains, mais enfouis au plus profond du processus créatif; souvent des livres d’art. Au centre, sûrement des lectures tout aussi importantes, mais plus variées : musique, théatre, littérature, philosophie. L’artiste y puise ses idées et son érudition. Au-dessus, comme pour faire la somme des événements, des livres d’histoire de l’art ou la biographie d’un grand artiste. Enfin, entremêlés çà et là, des livres anonymes, dont on ne voit que les pages usées, nous rappellent toutes ces lectures oubliées, mais qui ont marqué l’inconscient et l’imaginaire. Toutefois, chaque tableau est construit de manière aléatoire, puisant des images, des souvenirs récents ou lointains – personnels ou collectirs – associés aux livres, aux lectures, au savoir et à la culture. Chaque livre est un fragment des connaissance superposé à un autre, sans ordre précis créant une nouvelle couche de sigification. Ainsi, la lecture de l’oeuvre est à la fois diachronique et synchronique, autant pour l’artiste que pour le spectateur. Les idées passées, les idées présentes, les clins d’oeil à l’histoire et la citation font la richesse de cette série.
Les humanités traduit un moment important dans la carrière de Paul Béliveau. En effet, la série semble faire le point sur la production picturale de l’artiste, mettant en lumière ses sources d’inspiration littéraires et iconographiques, lesquelles invitent le public à explorer son imaginaire.